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Un océan sous la glace de Ganymède

Le Monde | • Mis à jour le

Vue d'artiste de Ganymède en orbite autour de Jupiter.

Un océan plus vaste que tous ceux de la Terre réuni. Voilà ce qu'héberge sous son épaisse croûte glacée Ganymède, la plus grosse lune de Jupiter et du Système solaire, selon des observations faites au télescope spatial Hubble dévoilées jeudi 12 mars dans le Journal of Geophysical Research.

Selon les scientifiques, cet océan a une profondeur de 100 kilomètres, dix fois plus que ceux de la Terre, et est enterré sous une croûte de 150 kilomètres formée pour l'essentiel de glace. « Nous pensons que dans un lointain passé cet océan a même pu communiquer avec la surface », a précisé Jim Green, le directeur de la division science planétaire de la NASA. 

« La vie au-delà de la Terre »

Dès les années 1970, les planétologues soupçonnaient déjà, sur la base de modèles d'étude de grandes lunes, que Ganymède, découverte en 1610 par Galilée, pourrait posséder un océan, a relevé Joachim Saur, de l'université de Cologne, en Allemagne, l'un des principaux auteurs de cette découverte. « Nous n'avons plus de doutes », a-t-il dit, et il a précisé que les dernières indications fournies par Hubble « constituent les meilleures preuves de l'existence d'un océan sur Ganymède ».

 « Un océan profond sous la croute glacée de Ganymède ouvre encore plus de possibilités exaltantes quant à l'existence de la vie au-delà de la Terre », a expliqué John Grunsfeld, responsable de la recherche scientifique de la NASA, qui estime que cette découverte marque « une étape significative ».

L'eau sous la glace

La sonde Galilée, qui a étudié Jupiter et ses nombreuses lunes pendant huit ans pour la NASA, avait effectué six survols rapprochés de Ganymède, détectant un champ magnétique en 2002. Cela avait été la première indication confortant l'hypothèse de l'existence d'un océan, mais ses observations avaient été trop brèves pour le confirmer complètement.

L'intérieur de Ganymède, selon la NASA.

Ces nouvelles observations avec Hubble, faites à partir des rayonnements ultraviolets, ont permis de détecter et d'étudier des aurores boréales dans les régions polaires de Ganymède, comme sur la Terre, qui sont provoquées par le champ magnétique. Ganymède est aussi sous l'influence du champ magnétique de Jupiter, dont elle est proche. Chaque fois que le champ magnétique de Jupiter change, les aurores boréales sur Ganymède changent aussi.

C'est en observant ce mouvement des aurores boréales que les scientifiques ont pu déterminer l'existence d'un vaste océan d'eau salée sous la croûte. Celui-ci affecte le champ magnétique de la lune. Etant donné que l'eau salée est conductrice d'électricité, le mouvement de l'océan influence le champ magnétique.

Représentation des aurores boréales de Ganymède.

L'existence d'un océan liquide sous une couche de glace a déjà été confirmée sur Europe, une autre lune de Jupiter, sur laquelle les possibilités d'existence d'une vie microbienne semblent prometteuses. Hormis la Terre, Europe est l'un des endroits du Système solaire où il y a la plus grande probabilité de trouver aujourd'hui la vie, selon Robert Pappalardo, un responsable scientifique au Jet Propulsion Laboratory (JPL) de la NASA.

Europe est recouverte d'une couche de glace relativement fine, possède un océan liquide sous la glace en contact avec des roches en profondeur, est géologiquement active et est bombardée de radiations qui créent des oxydants et forment en se mélangeant à l'eau une énergie idéale pour alimenter la vie, a expliqué ce scientifique.

Les geysers d'Encelade

Une autre découverte annoncée mercredi dans la revue britannique Nature accroît encore davantage la possibilité de la vie ailleurs dans le Système solaire : des chercheurs américains ont en effet découvert qu'Encelade, une lune de Saturne, a une activité hydrothermale, ce qui ouvre la possibilité que la vie puisse y exister.

Les scientifiques sont arrivés à cette conclusion en analysant des données envoyées par la sonde Cassini. Ils ont pu détecter des poussières de roche riches en silice éjectées par des geysers de la lune qui prouvent qu'elle abrite bien une activité hydrothermale, et donc un environnement favorable à l'éclosion de la vie.